Bientôt un Starshield européen ? la proposition de Kongsberg et Helsing
Bientôt un Starshield européen ? la proposition de Kongsberg et Helsing
© Helsing, Konsberg, Isar Aerospace, Hendsoldt

publié le 15 décembre 2025 à 19:20

561 mots

Bientôt un Starshield européen ? la proposition de Kongsberg et Helsing

Le 10 décembre, les compagnies allemande Helsing et norvégienne Kongsberg ont annoncé joindre leurs forces dans la proposition d’une future constellation satellite en orbite basse capable de fournir des services de renseignements et de communication. Une annonce on ne peut plus opportune.


Les premiers petits satellites seront déployés d’ici 3 ans. On ignore combien de satellites constitueront cette constellation, mais on nous annonce un nombre « substantiel ».

Un Starshield européen : facile ?

 Basé à Tromso en Norvège, Kongsberg fournira les plateformes. Le groupe a racheté en 2022 le très connu constructeur de petits satellites lituanien NanoAvionics. La compagnie allemande Hensoldt fournira les capteurs radar/SAR, optiques, infrarouge, et de guerre électronique. Helsing apportera ses capacités logicielles avec IA pour fusionner et analyser les données. La descente des données se fera via le réseau d’antennes de Kongsberg Satellite Services (KSAT). Pour la mise en orbite, le duo favorise d’office des lancements souverains depuis Andoya en Norvège avec la compagnie Isar Aerospace.

Les porteurs du projet se targuent de leur expérience opérationnelle dans le cadre de la guerre en Ukraine. Le projet propose ni plus ni moins que le kit complet pour répondre aux besoins militaires de veille en orbite basse. On retrouve ce service avec Starshield de SpaceX, version militarisée de Starlink qui allie communication sécurisée et imagerie terrestre. Le National Reconnaissance Office (NRO), pilote des infrastructures spatiales du renseignement américain, en compte plusieurs centaines. En proposant une chaîne de production en Allemagne et des lancements en Norvège, le duo Kongsberg-Helsing propose ainsi une version souveraine, qui promet d’être low-cost en vertu de la petite taille des satellites. Elle ne pourra toutefois pas se substituer aux satellites d’observation de la Terre à haute résolution tels que Pleiades Neo ou les satellites CSO de l’Armée française de l’Air et de l’Espace.

Un jeu de trouble-fête ?

Les deux industriels de défense et de spatial proposent leur solution commune seulement 13 jours après le vote du prochain budget de l’agence spatiale européenne, qui comporte un premier investissement de près de 1.5 milliard d’euros dans un projet de constellation satellite européenne d’observation de la Terre pour les gouvernements et les forces armées du Vieux continent (EOGS, avec comme premier jalon le programme ERS – European Resilience from Space). Ce budget inclut le financement de prototypes de segments optiques (satellite d’observation de la Terre), de communication sécurisée, et de navigation avec l’augmentation du réseau européen Galileo. ERS est – presque – financièrement sécurisé (quelques fonds supplémentaires devant être votés début 2026). Le reste d’EOGS sera financé via le prochain budget pluriannuel de l’Union Européenne (MFF 2028). ERS permettra d’en déterminer l’architecture. Mais Helsing et Kongsberg n’ont pas attendu pour proposer la leur.

L’Allemagne et la Norvège ne sont pas les plus grands contributeurs du programme ERS, en comparaison de l’Espagne ou de la Pologne, mais l’Allemagne pourrait aisément se laisser tenter par la proposition pour inclure dans sa stratégie le recours à une veille continue d’observation de la Terre, pouvant être couplée à de la délégation de drone pour observer des zones à intérêt. Favoriser les lanceurs allemands est également un argument favorable. Mais si l’Allemagne s’intéresse à cette solution, gardera-t-elle des fonds pour financer EOGS ? Ou poussera-t-elle l’UE à choisir le duo Kongsberg-Helsing comme maîtres d’œuvre d’une partie du segment de la constellation européenne ? Les premiers pions avancent sur l’échiquier. On attend désormais les contre-propositions du reste de l’industrie.

La question se pose aussi dans le cadre du partenariat franco-allemand d’échange d’images. La France partage son segment optique de très haute résolution CSO tandis que l’Allemagne fournit des images radars. Si l’Allemagne se dote de son propre « Starshield », va-t-elle délaisser le partenariat ?

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15/12/2025 19:20
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Bientôt un Starshield européen ? la proposition de Kongsberg et Helsing

Le 10 décembre, les compagnies allemande Helsing et norvégienne Kongsberg ont annoncé joindre leurs forces dans la proposition d’une future constellation satellite en orbite basse capable de fournir des services de renseignements et de communication. Une annonce on ne peut plus opportune.

Bientôt un Starshield européen ? la proposition de Kongsberg et Helsing
Bientôt un Starshield européen ? la proposition de Kongsberg et Helsing

Les premiers petits satellites seront déployés d’ici 3 ans. On ignore combien de satellites constitueront cette constellation, mais on nous annonce un nombre « substantiel ».

Un Starshield européen : facile ?

 Basé à Tromso en Norvège, Kongsberg fournira les plateformes. Le groupe a racheté en 2022 le très connu constructeur de petits satellites lituanien NanoAvionics. La compagnie allemande Hensoldt fournira les capteurs radar/SAR, optiques, infrarouge, et de guerre électronique. Helsing apportera ses capacités logicielles avec IA pour fusionner et analyser les données. La descente des données se fera via le réseau d’antennes de Kongsberg Satellite Services (KSAT). Pour la mise en orbite, le duo favorise d’office des lancements souverains depuis Andoya en Norvège avec la compagnie Isar Aerospace.

Les porteurs du projet se targuent de leur expérience opérationnelle dans le cadre de la guerre en Ukraine. Le projet propose ni plus ni moins que le kit complet pour répondre aux besoins militaires de veille en orbite basse. On retrouve ce service avec Starshield de SpaceX, version militarisée de Starlink qui allie communication sécurisée et imagerie terrestre. Le National Reconnaissance Office (NRO), pilote des infrastructures spatiales du renseignement américain, en compte plusieurs centaines. En proposant une chaîne de production en Allemagne et des lancements en Norvège, le duo Kongsberg-Helsing propose ainsi une version souveraine, qui promet d’être low-cost en vertu de la petite taille des satellites. Elle ne pourra toutefois pas se substituer aux satellites d’observation de la Terre à haute résolution tels que Pleiades Neo ou les satellites CSO de l’Armée française de l’Air et de l’Espace.

Un jeu de trouble-fête ?

Les deux industriels de défense et de spatial proposent leur solution commune seulement 13 jours après le vote du prochain budget de l’agence spatiale européenne, qui comporte un premier investissement de près de 1.5 milliard d’euros dans un projet de constellation satellite européenne d’observation de la Terre pour les gouvernements et les forces armées du Vieux continent (EOGS, avec comme premier jalon le programme ERS – European Resilience from Space). Ce budget inclut le financement de prototypes de segments optiques (satellite d’observation de la Terre), de communication sécurisée, et de navigation avec l’augmentation du réseau européen Galileo. ERS est – presque – financièrement sécurisé (quelques fonds supplémentaires devant être votés début 2026). Le reste d’EOGS sera financé via le prochain budget pluriannuel de l’Union Européenne (MFF 2028). ERS permettra d’en déterminer l’architecture. Mais Helsing et Kongsberg n’ont pas attendu pour proposer la leur.

L’Allemagne et la Norvège ne sont pas les plus grands contributeurs du programme ERS, en comparaison de l’Espagne ou de la Pologne, mais l’Allemagne pourrait aisément se laisser tenter par la proposition pour inclure dans sa stratégie le recours à une veille continue d’observation de la Terre, pouvant être couplée à de la délégation de drone pour observer des zones à intérêt. Favoriser les lanceurs allemands est également un argument favorable. Mais si l’Allemagne s’intéresse à cette solution, gardera-t-elle des fonds pour financer EOGS ? Ou poussera-t-elle l’UE à choisir le duo Kongsberg-Helsing comme maîtres d’œuvre d’une partie du segment de la constellation européenne ? Les premiers pions avancent sur l’échiquier. On attend désormais les contre-propositions du reste de l’industrie.

La question se pose aussi dans le cadre du partenariat franco-allemand d’échange d’images. La France partage son segment optique de très haute résolution CSO tandis que l’Allemagne fournit des images radars. Si l’Allemagne se dote de son propre « Starshield », va-t-elle délaisser le partenariat ?



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